2. Quelles étiquettes t’apposerais-tu et comment s’appliquent-elles (mal) à toi? (ou si tu n’aimes pas les étiquettes, comment te décrirais-tu?) La meilleure étiquette que j’ai trouvé puisqu’elle est sujette à explicitation et réappropriation constante c’est « je suis queer ». Il n’y a pas de définition fixe pour le queer, c’est ce qui en fait sa beauté, sa richesse et cela est parfaitement concordant avec son discours sur la non fixité des genres, des sexes et de l’orientation sexuelle. Parfois, je m’amuse aussi à me dire « fem plurisexuelle genderqueer », fem parce que j’aime beaucoup performer les stéréotypes féminins, plurisexuelle puisque j’aime les hommes stéréotypés, les femmes stéréotypées, les hommes féminins, les femmes masculines, les butchs, les genderqueers, les transsexuelles femmes et hommes, etc. et finalement genderqueer car j’aime aussi performer une certaines forme de masculinité, faire du genderfucking en portant une brassière qui aplatit mes seins tout en portant une minijupe ou encore porter un pantalon, cravate et veston tout en portant un soutient gorge qui augmente la rondeur de mes seins. Mais si ma pratique genderqueer a tjrs été plutôt subtile, elle restait surtout à un niveau conceptuel à savoir que je m’imaginais souvent avec des attributs physiques masculins sans pour autant les performer dans la réalité. Il y a quelques jours cependant (je me suis fait coupé les cheveux très courts en mowak), ont m’a violemment « taguée » genderqueer. En effet, un homme sur la rue s’est mis à m’exiger que je lui révèle mon identité sexuelle parce que mon genre ne correspondait pas aux stéréotypes hétérosexistes généralement admis par la société. Étant incapable de me caser dans la catégorie homme ou femme, cet homme m’a bousculé et m’a barré le chemin afin que je lui révèle une identité qui lui serait intelligible. Me voyant de plus près, il a alors réalisé que j’étais une femme et a laissé tombé son entreprise de violence mais en fait, j’aurais bien pu m’identifier comme homme il ne l’aurait jamais su puisque ce n’est pas mon point de vue qui importait dans cette histoire, c’est le sien.
3- Où t’impliques-tu et quelles sont les causes importantes pour toi? Je m’implique actuellement dans une communauté d’intervenant-e-s en éthique appliquée. J’ai aussi créé un groupe de lecture queer francophone. Par ailleurs, lorsqu’on me demande des entrevues portant sur les questions queers, je réponds toujours ou presque. Je m’associe à de nombreux groupes LGBTQ et féministes sur facebook, signe des pétitions, participe à des événements queers et féministes. Lorsque je peux, j’apporte ma contribution intellectuelle, artistique et monétaire à ces événements. J’ai fais un peu de bénévolat pour la semaine queer radicale, créé et présenté une performance artistique lors de cet événement et j’espère continuer à contribuer un peu durant ma maîtrise (et beaucoup lorsqu’elle sera terminée). Comme je l’ai mentionné plus tôt, mon engagement est beaucoup axé sur la sensibilisation aux personnes que je rencontre. Les causes importantes pour moi sont donc surtout celles auxquelles je m’identifie profondément soit celles des femmes et des queers bien que celles des blacks, des pauvres, des SDF, des toxicomanes (je suis infirmière en toxicomanie), des personnes ayant des troubles de santé mentale et de l’environnement me touchent aussi. C’est juste qu’on ne peut être partout à la fois!
Question 4 (Désolée, je l’ai effacé par inadvertance…) Quelle question fantastique! Pour moi, la fierté est d’abord une émotion forte. Elle est ce ressenti agréable qui d’un point de vue physique, fait en sorte qu’une personne se tient droite, ouverte, la tête haute, et dégage une énergie bien particulière, celle de l’affirmation, des convictions bien encrées, celle qui fait qu’une personne rayonne de tout son être. Pour moi, la fierté est donc aussi une question d’affirmation de soi et d’approbation par autrui, elle est intimement reliée à la reconnaissance et donc, se situe dans une relation intersubjective positive empreinte d’amour. Sans reconnaissance de l’autre, pas de place pour la fierté, sans reconnaissance de soi, pas de place non plus pour la fierté. La fierté c’est aussi le rejet de certaines émotions, je pense particulièrement à la peur et à la honte. La fierté c’est peut-être dans cette perspective une question de courage, celui de faire face à ses craintes, à ses doutes, à la violence pour clamer haut et fort à tous qui nous sommes et comment nous sommes des personnes belles et dignes de respect. La fierté, c’est enfin la reconnaissance de sa propre humanité, avec ses forces et ses faiblesses, avec sa créativité et ses incertitudes, c’est une déclaration d’amour à notre appartenance à la communauté humaine.
5- Quels sont selon toi les enjeux actuels et futurs des communautés lgbt/queer? La violence, la stigmatisation et l’oppression bien sûr. Ceci dit, pour ce qui est de la communauté queer, je pense surtout aux genderqueers et aux trans, c’est d’être capables de se faire une place dans les labyrinthes de la bureaucratie gouverne-le-mental, c’est-à-dire de pouvoir être reconnu-e-s dans une identité complexe, sans se faire pathologiser, avoir accès plus facilement à des soins de santé pour les trans, pouvoir changer de nom et de sexe plus facilement sans nécessairement devoir faire une thérapie, ou encore se faire enlever l’utérus parce que si on porte un nom dit masculin alors qu’on s’identifie comme une femme, il faut nécessairement être transsexuel, les zones grises n’étant pas valables. Etc. Etc. Pouvoir parler de sexualité complexe, du SM, des relations polyamoureuses et faire du genderfucking sans se faire juger et regarder comme un-e extraterrestre, un-e sous-humain-e, voire inhumain-e. Faire plus de place aux femmes dans la communauté gaies de Mtl. La lutte contre l’obligation de se conformer à un modèle hétéronormatif des relations amoureuses lorsqu’on est queer. Le mariage gai, c’est bien, mais encore une fois, ce n’est pas la seule façon de vivre une relation amoureuse légitime. L’enseignement sur la sexualité à l’école secondaire ainsi qu’aux enjeux reliés au sexisme, à l’homophobie, au VIH/SIDA, aux ITSS, etc. etc., parce qu’un ami qui travaille à entrer dans les écoles secondaires pour le faire se fait encore répondre par certains direct-tueurs de l’école que l’homosexualité n’existe pas dans « leur » école. Le soutient aux jeunes et moins jeunes par une communauté solide, parce que le rejet par les familles et la société de façon générale est encore vécu par toutes les personnes que je connais sans exception. L’intrusion de l’État dans les mœurs sexuelles avec des lois condamnant la prostitution et les soirées entre adultes. Il devrait y avoir plus d’accès à des soins de santé, je pense entre autre à de l’aide psychologique gratuite pour la communauté, pas parce que nous sommes malades, mais parce que la société nous rends malades en nous opprimant! Prévention contre le suicide par bcp d’amour et de soutient, prévention également contre la toxicomanie dans le même esprit. J’en oublie, parce qu’il y a bcp trop à dire, mais je m’arrête ici.
6. Pourquoi Montréal et quels y sont tes endroits préférés? Montréal parce que j’y trouve des gens qui ont les mêmes intérêts que moi. J’y trouve ma place comme personne différente et originale sans me faire trop ostraciser. J’y ai même finalement trouvé une contre-culture dans laquelle je peux être totalement libre, totalement moi-même pour la première fois de ma vie. Si je dois me plier aux mœurs aliénantes de la société quotidiennement, je puis, quelques fois par mois, être dans des espaces où on respecte qui je suis. Plus encore, où on m’encourage à me défaire des patterns de censure qu’impose le « savoir-vivre ». Mes endroits préférés sont donc ceux où j’y trouve cette ouverture; les sex partys du collectif Against the wall, les événements organisés par la Semaine Queer Radicale, le quartier gai, Le cabaret Mado, Les événements organisés par Perverscités, mon groupe de lecture queer, les universités lorsqu’il y a des conférences sur le féminisme et le queer, les espaces autogérés (s’il en est), les CLSC, Le Centre Dollard-Cormier, Le St-Émilie, Les expositions artistiques, Le centre 2110, Le café Cléopâtre, Les Meow mix, l’appartement de ma maîtresse lorsqu’elle y organise des orgies, son lit, sa table de cuisine, sa baignoire à patte, le plancher de son corridor, sa cour arrière et sa ruelle (Oups! Désolée je m’emporte, tu pourras me censurer Bruno J), mon appartement.
7. Dessine (ou décris)-moi TA communauté
Amour
Respect
Sécurité
Autonomie
Solidarité
Compassion
Sexe
Art
Respect
Sécurité
Autonomie
Solidarité
Compassion
Sexe
Art